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Dimitri PHILOPOULOS

Avocat et Docteur en médecine

Défense de victimes d'erreurs médicales
22 av. de l'Observatoire - 75014 PARIS
Tél. 01 46 72 37 80

Droit de la santé : le rythme cardiaque fœtal expliqué aux victimes et aux avocats

Introduction

L'enregistrement intrapartum du rythme cardiaque fœtal permet une surveillance du bien-être fœtal pendant le travail d'accouchement.

Aujourd'hui, les recommandations du Collège national des gynécologues-obstétriciens français (CNGOF) publiées en 2007 sont devenues la référence pour la pratique clinique en maternité.

Ces recommandations permettent, d'une part, aux gynécologues-obstétriciens de reconnaître l'asphyxie fœtale et d'intervenir pour prévenir l'encéphalopathie anoxo-ischémique et donc l'infirmité motrice cérébrale (IMC) appelée aussi paralysie cérébrale (PC).

D'autre part, les mêmes recommandations fournissent des critères pour éviter d'intervenir quand l'asphyxie est peu probable.

Aussi ces critères du CNGOF ont-ils pour objectif celui d'une spécificité acceptable afin d'éviter les faux positifs qui peuvent conduire à des interventions, notamment des césariennes, inutiles voire dangereuses pour la mère et/ou l'enfant.

Pour arriver à ces objectifs, les critères du CNGOF permettent la classification des tracés du rythme cardiaque fœtal selon le risque d'acidose, ce dernier étant choisi puisque l'asphyxie fœtale conduit à une acidose métabolique (en raison d’une altération du métabolisme cellulaire du fœtus) qui est un critère objectif et quantifiable à la naissance.

Certes l'encéphalopathie anoxo-ischémique (ou l'infirmité motrice cérébrale / paralysie cérébrale) serait un critère plus pertinent mais elle est aussi beacoup plus difficile à utiliser en pratique. Cependant, l'association entre l'acidose métabolique et l'encéphalopathie est bien documentée donc l'acidose reste un critère pertinent pour la classification des tracés du rythme cardiaque fœtal.

Enfin, les recommandations permettent à la sage-femme de reconnaître les limites du tracé normal en dehors desquelles elle doit faire appel au médecin obstétricien.

Définitions

Rythme de base

Le rythme de base normal est entre 110 et 160 battements par minute (bpm). Un rythme supérieur à 160 bpm pendant plus de 10 minutes est appelé « tachycardie ». En revanche, un rythme inférieur à 110 bpm pendant plus de 10 minutes est appelé « bradycardie ».

Réactivité

Elle traduit la présence d'accélérations du rythme d'une amplitude (hauteur) d'au moins 15 bpm pendant au moins 15 secondes mais moins de 2 minutes. Si elle est supérieure à 2 minutes mais moins de 10 minutes, l'accélération est dite prolongée. Une durée supérieure à 10 minutes constitue un changement du rythme de base.

La présence d'au moins deux accélérations en 30 minutes est de pronostic néonatal favorable. En revanche, malgré une association démontrée entre l'absence d'accélérations et l'acidose fœtale, la valeur prédictive est faible et ainsi l'absence d'accélérations est souvent tolérée.

Ralentissements

Les ralentissements sont une décélération du rythme du cœur du fœtus d'une amplitude (profondeur) supérieure à 15 bpm avec une durée supérieure à 15 secondes mais inférieure à 2 minutes. Une durée supérieure à 10 minutes constitue une modification du rythme de base.

Il existe une classification des ralentissements selon leur aspect et leur position par rapport à la contaction utérine :

  • les ralentissements précoces débutent par une pente lente et progressive. Ils débutent et finissent avec les contractions utérines. Ils peuvent traduire une compression de la tête fœtale.
  • les ralentissements tardifs débutent par une pente lente et progressive. Ils sont décalés par rapport à la contraction utérine et finissent après la contraction. Ils signent souvent une atteinte de la fonction utéro-placentaire.
  • les ralentissements variables ont une pente initiale rapide en moins de 30 secondes et ils sont variables dans leur aspect et dans leur chronologie par rapport à la contraction utérine. Ils traduisent souvent une compression du cordon ombilical.
    • les ralentissements variables dits typiques sont précédés et suivis d'accélérations, lesquelles traduisent des ralentissements variables de meilleur pronostic toutes choses égales par ailleurs.
    • les ralentissements variables sont dits aptypiques notamment en cas de perte de ces accélérations ou un retour lent au rythme de base.
    • les ralentissements variables sont dits sévères si leur durée est supérieure à 60 secondes et si leur nadir (point le plus bas) est inférieur à 70 bpm ou leur amplitude (profondeur) est supérieur 60 bpm.
  • les ralentissements prolongés durent entre 2 et 10 minutes au maximum. Une durée supérieure à 10 minutes constitue un changement du rythme de base.

Variabilité

La variabilité du rythme cardiaque fœtal donne au tracé son aspect en « dents de scie ». Une variabilité normale est entre 6 et 25 bpm. La variabilité est minime si elle est inférieure ou égale à 5 bpm, elle est absente si inférieure à 3 bpm et marquée si supérieure à 25 bpm.

Contractions utérines

Elles sont enregistrées en même temps que le rythme cardiaque fœtal. Les contractions doivent être normales en leur fréquence (entre 2 et 5 contractions pour 10 minutes), intensité, durée et temps de relaxation entre les contractions.

Interprétation chez l'enfant né à terme ou près du terme

Le CNGOF a publié en 2013 un tableau qui synthétise le texte des recommandations de 2007 en présentant le risque d’acidose en quatre niveaux de couleurs différentes.

  • vert : tracé à faible risque d'acidose dont aucune action est nécessaire.
  • jaune : tracé à risque d'acidose ce qui nécessite des actions correctrices pour amélioration l'oxygénation et si celles-ci sont sans effet, l'emploi de technique de 2e ligne pour éliminer une acidose fœtale.
  • orange : tracé à risque élevé d'acidose ce qui nécessite une technique de 2e ligne si elle peut être entreprise sans délai, sinon extraction rapide dont les modalités (forceps, ventouse ou césarienne) sont une fonction du contexte obstétrical notamment la dilatation du col et l'engagement de la présentation du fœtus.
  • rouge : tracé à risque majeur d'acidose ce qui nécessite une extraction immédiate sans recours à technique de 2e ligne.

La classification des tracés dans ces quatre catégories est complexe mais on peut soulever quelques grandes lignes pour guider la famille d'un enfant atteint d'une IMC ou l'avocat en droit de la santé :

  • Si le rythme de base est normal et s'il n'y a pas de ralentissements, il s'agit d'un tracé vert donc à faible risque d'acidose.
  • Une anomalie isolée traduit souvent un tracé de niveau jaune et l'association de plusieurs anomalies fait passer un tracé jaune en orange. Par exemple, un cas fréquent d'un tracé jaune est celui des ralentissements tardifs non répétés ou des ralentissements variables inférieurs à 60s et supérieurs à 60 bpm d’amplitude.
  • Un tracé de niveau orange se voit souvent avec des ralentissements tardifs répétés ou des ralentissements variables supérieurs à 60s ou sévères éventuellement associés à une réduction de la variabilité (entre 3 et 5 bpm).
  • Un tracé de niveau rouge se voit avec une absence totale de variabilité (< 3 bpm) avec ou sans ralentissements ou bradycardie.

Souvent un tracé montre des ralentissements dans un premier temps, lesquels sont suivis d'une tachycardie et, plus tard, une réduction de la variabilité selon la séquence bien décrite de Hon.

Un élément important pour l'interprétation du rythme cardiaque fœtal est celui de la variabilité car une réduction de la variabilité signe souvent l'acidose fœtale.

En revanche, la prudence s'impose car la variabilité est souvent conservée alors que le pH fœtal est inférieur à 7,10 voire 7,0.

Quant à la réactivité, la présence d'au moins deux accélérations sporadiques (n'ayant pas de rapport avec les contractions utérines) est rassurante mais, selon une étude récente, il n'en irait pas de même des accélérations périodiques (survenant pendant les contractions).

Apport de l'informatique

A l'instar de son développement dans le domaine médical, l'informatique peut aider à la lecture du rythme cardiaque fœtal au sein d'un cabinet d'avocat intervenant dans le domaine du droit de la santé.

Un paramètre qui revient sur le devant de la scène est l'aire totale des ralentissements qui est fortement corrélée à une acidose à la naissance (pH inférieur à 7,10).

En effet, une étude prospective de cohorte remarquée sur 8.580 accouchements a montré que l'aire totale des ralentissements pendant les 120 minutes avant la naissance était prédictive d'un pH < 7,10 (AUC=0.76; 95% CI:0.72–0.80) et sa valeur prédictive était même supérieure à une classification à trois catégories (une classification à quatre catégories n'était pas étudiée). De manière importante, la variabilité modérée n'était pas un facteur prédictif indépendant d'un pH > 7,10 et son inclusion dans le modèle de regression n'a pas modifié le pouvoir discriminant de l'aire totale des ralentissements.

En effet, un pH < 7,10 est également associé à un risque augmenté d'encéphalopathie néonatale et la tendance actuelle est d'utiliser ce critère au lieu d'un pH < 7,0.

L'informatique permet un calcul rapide de l'aire totale des ralentissements au sein d'un cabinet d'avocat afin de trier rapidement des tracés traduisant un risque d'acidose du nouveau-né.

Notre cabinet d'avocat procède à une extraction des données du rythme cardiaque fœtal à partir d'un tracé numérisé pour ensuite effectuer un calcul informatique de l'aire totale des ralentissements (et un autre paramètre appelé la capacité de ralentissement) comme il est montré ci-dessous :


Vous pouvez consulter notre page d'accueil pour plus d'informations sur notre cabinet et prendre contact avec nous si votre enfant est victime d'une erreur médicale pendant l'accouchement ou la naissance.