2003-01-17
Cour d'appel de Paris
2002/05959
ARRÊT DU 17 JANVIER 2003 Pièce à conviction : Consignation P.C. :
COUR D'APPEL DE PARIS
13ème chambre, section B
(N , 10 pages) Prononcé publiquement le VENDREDI 17 JANVIER 2003, par la 13ème chambre des appels correctionnels, section B, Sur appel d'un jugement du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS - 31EME CHAMBRE du 10 AVRIL 2002, (P0107995013). PARTIES EN CAUSE DEVANT LA COUR :
X...
Y... né le 24 Février 1981 à PARIS 11E (75) de Gilles et de LEPREUX Chantal de nationalité française, célibataire Développeur de films jamais condamné, demeurant
Chemin des Dixmes
91410 CORBREUSE PREVENU, LIBRE, INTIME, COMPARANT, LE MINISTÈRE PUBLIC : APPELANT, Z...
A... PARTIE CIVILE, APPELANTE, REPRESENTEE par Maître RAVINETTI Eric, avocat au barreau de Paris (P 450) B...
C... PARTIE CIVILE, APPELANTE, REPRESENTEE par Maître RAVINETTI Eric, avocat au barreau de Paris (P 450) D...
E... PARTIE CIVILE, APPELANTE, REPRESENTEE par Maître RAVINETTI Eric, avocat au barreau de Paris (P 450) COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats et du délibéré, Président
:
:
Monsieur F...,Monsieur G..., ce dernier appelé d'une autre chambre pour compléter la Cour en l'absence et par empêchement des autres conseillers de cette chambre GREFFIER : Madame H... aux débats et au prononcé de l'arrêt. MINISTÈRE PUBLIC : représenté aux débats et au prononcé de l'arrêt par Monsieur LAUDET, avocat général. RAPPEL DE LA PROCÉDURE :
LA PREVENTION : X...
Y... a été poursuivi sous la prévention d'avoir, à Paris, courant 2000 et 2001 et jusqu'au 28 février 2001 :
1°) contrefait par édition ou reproduction une oeuvre de l'esprit au mépris des droits d'auteur (article L 335-3 du code de la propriété intellectuelle, 2°) effectué une reproduction ou une diffusion non autorisée de phonogramme, vidéogramme ou programme (article L 335-4 du code de la propriété intellectuelle) LE JUGEMENT : Le tribunal, par jugement contradictoire, a déclaré X...
Y... coupable de CONTREFACON PAR EDITION OU REPRODUCTION D'UNE OEUVRE DE L'ESPRIT AU MEPRIS DES DROITS DE L'AUTEUR, courant 2000 et 2001 et jusqu'au 28/02/2001, à Paris, infraction prévue par les articles L.335-2 AL.1,AL.2, L.335-3, L.112-2, L.121-8 AL.1, L.122-3, L.122-4, L.122-6 du Code propriété intellectuelle et réprimée par les articles L.335-2 AL.2, L.335-5 AL.1, L.335-6, L.335-7 du Code propriété intellectuelle coupable de REPRODUCTION OU DIFFUSION NON AUTORISEE DE PROGRAMME, VIDEOGRAMME OU PHONOGRAMME, courant 2000 et 2001 et jusqu'au 28/02/2001, à Paris, infraction prévue par les articles L.335-4 AL.1, L.212-3 AL.1, L.213-1 AL.2, L.215-1 AL.2, L.216-1 du Code propriété intellectuelle et réprimée par les articles L.335-4 AL.1, L.335-5 AL.1, L.335-6 du Code propriété intellectuelle et, en application de
ces articles, l'a condamné à une amende sous forme de Jours-Amende au nombre de 100 et d'un montant unitaire de 5 euros, ordonne à son encontre la confiscation des scellés ; Sur l'action civile : le tribunal a reçu les constitutions de parties civiles de A...
Z..., E...
D..., et C...
B..., la SACEM SDRM, Tristan NIHOUARN, Jean-François PAILLARD, Cédric FLOC'H et Eric DIGAIRE et a condamné Y...
X... à payer à : - la SACEM SDRM, la somme de 300 euros à titre de dommages-intérêts, celle de 360 euros au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, - Tristan NIHOUARN, la somme de 30 euros à titre de dommages-intérêts, celle de 120 euros au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, - Jean-François PAILLARD, la somme de 30 euros à titre de dommages-intérêts, celle de 120 euros au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, - Cédric FLOC'H, la somme de 30 euros à titre de dommages-intérêts, celle de 120 euros au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, - Eric DIGAIRE, la somme de 30 euros à titre de dommages-intérêts, celle de 120 euros au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, - A...
Z..., la somme de 120 euros à titre de dommages-intérêts, celle de 120 euros au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, - E...
D..., la somme de 90 euros à titre de dommages-intérêts, celle de 120 euros au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, - C...
B..., la somme de 60 euros à titre de dommages-intérêts, celle de 120 euros au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale. Le tribunal a dit n'y avoir lieu à application de l'article L 335-5 alinéa 1er du code de la propriété intellectuelle ; Le tribunal a dit que les scellés ont été confisqués au titre de l'action publique, a dit que les scellés n° 2, 3 et 4 seront remis à la SACEM SDRM, Le tribunal a dit n'y avoir lieu à publication, a dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ; Le tribunal a rejeté le surplus des demandes formulées
par les parties civiles. . LES APPELS : Appel a été interjeté par :
Monsieur Z...
A..., le 18 Avril 2002, contre Monsieur X...
Y..., Monsieur B...
C..., le 18 Avril 2002 ,contre Monsieur X...
Y... Monsieur D...
E..., le 18 Avril 2002, contre Monsieur X...
Y..., M. le Procureur de la République, le 23 Avril 2002, contre Monsieur X...
Y... DÉROULEMENT DES I... : A l'audience publique du 6 DECEMBRE 2002, le président a constaté l'identité du prévenu ; Maître RAVINETTI, avocat des parties civiles, a déposé des conclusions ; Madame BARBARIN a fait un rapport oral ; X...
Y... a été interrogé ; ONT ETE ENTENDUS Maître RAVINETTI, avocat des parties civiles, en ses conclusions et plaidoirie ; Monsieur LAUDET, avocat général, en ses réquisitions ; X...
Y... en ses explications ; X...
Y... a eu la parole en dernier. Le président a ensuite averti les parties que l'arrêt serait prononcé le 17 JANVIER 2003 A cette date il a été procédé à la lecture de l'arrêt par l'un des magistrats ayant participé aux débats et au délibéré. DÉCISION : Rendue contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi, Statuant sur les appels régulièrement interjetés par les parties civiles et le Ministère Public à l'encontre du jugement déféré ; A l'audience du 6 décembre 2002, M. A...
Z..., membre du groupe musical "SERGENT Z...", M. E...
D... dit "PIERPOL JAK" et M. C...
B..., membre du groupe musical "NOIR DESIR", parties civiles appelantes, représentées par leur conseil, demandent à la Cour, par voie de conclusions conjointes : - de condamner Y...
X... à payer :
- à l'artiste-interpréte A...
Z..., membre du groupe musical "SERGENT Z..." la somme de 1219,59 euros outre celle de 304,90 euros au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale,
- à l'artiste-interprète E...
D... dit "PIERPOLJAK", à titre de dommages-intérêt en réparation de l'intégralité des préjudices par lui subis, la somme de 914,69 euros outre celle de 304,90 euros au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale,
- à l'artiste-interprète C...
B..., membre du groupe musical "NOIR DESIR" à titre de dommages-intérêts en réparation de l'intégralité des préjudices par lui subis, la somme de 609,80 euros outre celle de 304,90 euros au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale. - d'ordonner aux frais de Y...
X... la publication par extraits de l'arrêt à intervenir dans deux journaux ou magazines ainsi que sur un site internet au choix des parties civiles, et ce sans que le coût ne dépasse la somme totale de 2300 euros. - de condamner Y...
X... aux entiers dépens, tant de première instance que d'appel. Ils soutiennent qu'ils ont subi un grave préjudice matériel consistant, ainsi que l'a relevé le tribunal correctionnel de Metz dans un jugement rendu le 22 février 1996, " d'une part, en la perte de redevance sur la vente d'enregistrements licites lorsqu'il en existe, en raison de la commercialisation d'enregistrements illicites ; d'autre part, en la diminution des ventes d'enregistrements licites par la commercialisation d'enregistrements illicites du même artiste". Ils soulignent que ce préjudice matériel est d'autant plus important en l'espèce que les "BOOTLEGS" étaient vendus sur catalogue proposé sur le réseau Internet à des prix bradés par rapport aux prix de vente pratiqués dans le commerce pour des CD licites. Ils font valoir qu'ils ont également subi un préjudice moral, ledit préjudice étant défini par le jugement susvisé du tribunal correctionnel de Metz comme étant, pour l'artiste-interprète : " une atteinte à son droit moral : le non-respect de la volonté de l'artiste-interprète qui n'a pas donné
son consentement à des enregistrements ni à leur diffusion " " une atteinte à son image : les enregistrements étant effectués clandestinement et diffusés dans des conditions et des moyens techniques défectueux, l'artiste-interprète voit véhiculer de lui-même une image qui n'est pas conforme à celle qu'il souhaite donner au public " " une atteinte à la réputation : ces enregistrement engendrent des difficultés dans les relations de l'artiste-interprète avec son producteur et son distributeur avec lesquels il est lié par des contrats d'exclusivité". Que ce préjudice moral est d'autant plus grave que le prévenu a commercialisé des enregistrements médiocres de leurs concerts, avec des moyens de fortune. Le Ministère Public demande à la Cour de faire au prévenu une application modérée de la loi pénale, celui-ci n'ayant jamais été condamné jusqu'à présent, mais d'ordonner la publication de l'arrêt à intervenir. M. X... fait valoir que les faits qui lui sont reprochés se sont passés il y a plus de deux ans, alors qu'il était encore au lycée, passionné de musique et d'informatique, qu'il a pu acquérir par la voie de l'échange avec d'autres internautes presque tous les concerts du groupe GARBAGE, qui connaissait son site, qu'il n'a jamais gagné d'argent au moyen de cette activité et que ce n'était d'ailleurs pas son but. Que, s'agissant des parties civiles appelantes, il n'avait réalisé que trois CD de leurs concerts, et quasiment rien vendu. Que, par ailleurs, il a déjà payé les dommages-intérêts dus à la SACEM et à la SDRM, que son matériel informatique (d'une valeur de 12000 F) a été saisi, ainsi que tous ses CD, ce qui lui a causé une perte émotionnelle. Il précise qu'il prépare actuellement un BTS d'informatique en alternance et perçoit mensuellement environ le montant du SMIC. Sur Ce, La Cour, I - Sur l'action publique Le 27 février 2001, la SACEM-SDRM déposait plainte auprès de la Brigade d'Enquêtes sur les fraudes aux Technologies de
l'Information, car elle avait découvert un site internet qui proposait à la vente des compact-disc (CD) provenant d'enregistrements pirates réalisés au cours de concerts d'artistes-interprètes français et étrangers. Les enquêteurs constataient en consultant ce site qu'un formulaire en ligne permettait de laisser ses coordonnées et le détail de sa commande, les prix pratiqués étant de 10 dollars pour un CD simple et de 15 dollars pour un double . Par la suite le responsable du site, qui était identifié comme étant Y...- X..., renvoyait ses propres coordonnées afin que l'acheteur règle sa commande. Le 28 février 2001, une perquisition était effectuée au domicile de M. X..., 52, rue Damesme à Paris (13ème) et permettait de saisir : - 300 CD Rom contrefaisant ; - des cassettes vidéo au format VHS ; - 1003 dollars américains ; - l'unité centrale de l'ordinateur ; - 37 CD Rom prêts pour être expédiés à un unique client américain. Le prévenu déclarait qu'il avait enregistré son premier concert, au zénith à Paris, en 1999, qu'il en avait enregistré une dizaine au total, fixés sur CD Rom, qu'il avait d'abord échangé ces enregistrements pirates dit "Bootlegs", par courriers, avec des internautes, et que, fin 1999, il avait créé son propre site internet avec possibilité d'acheter des CD car certains internautes lui avaient demandé de leur vendre des enregistrements du groupe GARBAGE. Il a reconnu qu'il se livrait à cette activité depuis environ un an et qu'il était conscient qu'il se trouvait dans l'illégalité en proposant des "bootlegs" à la vente ou à l'échange sur son site ; il a précisé que la somme de 1003 dollars américains saisie à son domicile provenait d'une vente à un client américain, et la comptabilité découverte également au cours de la perquisition a fait apparaître un chiffre d'affaires d'environ 15 000 francs. En enregistrant ces concerts, puis en les reproduisant sur CD et en les diffusant, que ce soit pour échanger ou pour vendre, en
violation des droits des artistes-interprètes, Y...
X... a commis une contrefaçon au sens de l'article L 335-3 du code de la propriété intellectuelle. De même, en reproduisant et en diffusant des phonogrammes sans l'autorisation écrite des artistes-interprètes qui, comme l'a rappelé le tribunal, ont droit au respect de leur nom, de leur qualité et de leur interprétation, le prévenu a commis l'infraction prévue et réprimée par l'article L 335-4 du code de la propriété intellectuelle. Il convient, dès lors, de confirmer le jugement déféré tant sur la déclaration de culpabilité que sur l'amende sous forme de jours-amendes (soit 100 jours-amendes d'un montant unitaire de 5 euros) prononcée par les premiers juges. La Cour confirmera également le jugement en ce qu'il a ordonné la confiscation des scellés. II - Sur les actions civiles Les parties civiles ont subi un préjudice matériel résultant directement de la commercialisation illicite de leurs concerts dès lors qu'il a pu en résulter une perte de redevances sur la vente d'enregistrements licites et une diminution de ces ventes. Toutefois, il convient de rappeler que Y...
X... n'a vendu que 3 CD reproduisant un concert du groupe "SERGENT Z...", 2 CD reproduisant un concert de "PIERPOLJAK" et 1 CD reproduisant une prestation du groupe "NOIR DESIR". Les parties civiles ont également subi un préjudice moral certain, découlant directement des agissements délictueux de Y...
X..., dès lors que ceux-ci ont porté atteinte à leur droit moral de consentir ou non aux enregistrements et à leur diffusion ainsi qu'à leur image, les dits enregistrements étant de qualité médiocre. Les premiers juges ayant fait une exacte appréciation des préjudices subis par les parties civiles, toutes causes confondues, la Cour confirmera le jugement sur les dommages-intérêts qui ont été alloués à MM. A...
Z..., E...
D... et C...
B..., ainsi que sur les sommes que M. X... a été condamné à leur verser en application
de l'article 475-1 du Code de procédure pénale. En revanche, l'équité ne commande pas de faire droit aux demandes des parties civiles au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel. Enfin, il y a lieu d'ordonner aux frais de Y...
X... la publication par extraits du présent arrêt dans deux journaux ou magazines ainsi que sur un site internet, sans que le coût ne dépasse 1200 euros. PAR CES MOTIFS LA COUR Statuant publiquement et contradictoirement, Reçoit les appels du Ministère Public, de MM. A...
Z..., C...
B... et E...
D..., parties civiles, CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions pénales, CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions civiles concernant MM. A...
Z..., C...
B... et E...
D..., Y ajoutant : Ordonne la publication du présent arrêt, par extraits, dans deux journaux ou magazines ainsi que sur un site internet, aux frais de Y...
X..., sans que le coût ne dépasse 1200 euros ; Déboute les parties civiles du surplus de leurs demandes, Condamne Y...
X... aux dépens des actions civiles. LE PRESIDENT LE GREFFIER La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure de 120 euros dont est redevable le condamné.
Source : DILA - dernière mise à jour 22 septembre 2020 - ftp://echanges.dila.gouv.fr/
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