Dimitri PHILOPOULOS
Avocat et Docteur en Médecine

22 av. de l'Observatoire - 75014 PARIS
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Avocat au Barreau de Paris avec plus de 25 ans d'expérience dans la défense et l'indemnisation de victimes d'erreur médicale.

Cour d'appel de Paris, 17 janvier 2020, 18/053537

2020-01-17

Cour d'appel de Paris

Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

18/053537




Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


Cour d'appel de Paris
Pôle 4 - chambre 1

Arrêt du 17 janvier 2020

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : No RG 18/05353 - No Portalis 35L7-V-B7C-B5IKE

Décision déférée à la cour : jugement du 10 janvier 2018 -tribunal de grande instance de Créteil - RG no 15/10174


APPELANTES

Madame E... W...
née le [...] à Rouen (76000)
[...]
[...]

représentée et assistée de Me Marion Hochart de la SELARL Alterjuris avocats, avocat au barreau de Paris toque : D1494

Madame D... V...
née le [...] à Bastia (20200)
[...]
[...]

représentée et assistée de Me Marion Hochart de la SELARL Alterjuris avocats, avocat au barreau de Paris toque : D1494

INTIMES

Monsieur F..., S... L...
né le [...] à Levallois-Perret (92)

[...]
[...]

représenté par Me Anne-Marie MAUPAS OUDINOT, avocat au barreau de Paris, toque : B0653
Ayant pour avocat plaidant Me Anne-Sophie PUYBARET de la SELAS Larrieu ET associés, avocat au barreau de Paris, toque : J073,

Madame G... N...
née le [...] à Saint-Maurice (94410)

[...]
[...]

représentée par Me Anne-Marie MAUPAS OUDINOT, avocat au barreau de PARIS, toque : B0653
Ayant pour avocat plaidant Me Anne-Sophie PUYBARET de la SELAS Larrieu ET associés, avocat au barreau de Paris, toque : J073,

SA AXA France IARD recherchée en qualité d'assureur de la société TRADI BAT 94 - agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
no siret : 722 057 460 01971

[...]
[...]

représentée par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés,
Ayant pour avocat plaidant avocat au barreau de Paris, toque : K0111, Me Maud BRUNEL, avocat au barreau de Paris, toque : D1922

SARL Tradi bât 94
[...]
[...]

défaillante

Composition de la cour :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 octobre 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Monique Chaulet, conseillère , chargée du rapport.


Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
M. Claude Creton, président
Mme Christine Barberot, conseillère
Mme Monique Chaulet, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Léna Etienne


Arrêt :

- défaut
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Claude Creton, président, et par Grégoire Grospellier, greffier lors de la mise à disposition.

Par acte notarié du 12 juillet 2012, Mmes W... et V... ont fait l'acquisition d'un bien immobilier appartenant à M. L... et à Mme N..., situé [...] .

Aux termes de l'acte de vente il est indiqué : « que le bien vendu a fait l'objet de travaux d'extension et de surélévation confiés à la Société TRADI BAT 94, assurée auprès de la
Compagnie AXA France, au titre de sa responsabilité décennale ».

« Que les vendeurs, n'ont pas au temps de la construction souscrit une assurance dommages-ouvrages ; qu'ainsi ils sont tenus envers l'acquéreur de la garantie décennale visée aux articles 1792 et suivants du code civil ».

Les consorts LN... ont déposé en mairie un dossier de permis de construire le 28
avril 2004, lequel a été accordé par l'autorité municipale.

Les travaux consistaient pour l'essentiel en :
• une surélévation de la maison existante (création de deux étages)
• une extension côté jardin (création de la cuisine et de la salle de bains)
• une extension en sous-sol (création d'une salle par décaissement du terrain)

La déclaration d'achèvement des travaux date du 15 septembre 2006.

Dans le courant du mois d'août 2012, Mmes W... et V... ont constaté l'apparition de désordres dont elles ont immédiatement fait part à M. L....

Devant l'ampleur des désordres, elles ont sollicité du juge des référés la désignation d'un expert.

Par ordonnance du 5 mars 2013, le juge des référés du tribunal de grande instance de Créteil a ordonné une expertise confiée à M. K....

Par ordonnance du juge des référés du tribunal de grande instance de Créteil du 3 février 2014, la mission de l'expert a été étendue au défaut d'isolation acoustique du pavillon ainsi qu'au problème d'humidité affectant le mur de la cuisine et, par ordonnance du 24 mars 2015 et l'ordonnance rectificative du 5 mai suivant, la mission de l'expert a été étendue à l'examen des éventuels défauts affectant la dalle porteuse située au-dessus de l'extension du sous-sol du pavillon.

La société TRADI BAT ayant été placée en liquidation judiciaire, les demanderesses ont régulièrement déclaré leur créance auprès du mandataire liquidateur et les opérations d'expertise ont été déclarées communes au liquidateur de la société TRADI BAT 94 par les ordonnances des 24 mars et 5 mai 2015 susmentionnées.

L'expert a déposé son rapport le 15 avril 2016.

Par jugement rendu le rendu le 20 janvier 2018, le tribunal de grande instance de Créteil a:
- rejeté la demande de nullité du rapport d'expertise,
- condamné in solidum Mme G... N..., M. F... L... et la société AXA France IARD en qualité d'assureur de la société TRADI BAT 94 à payer à Mme D... V... et Mme E... W... les sommes suivantes :
. 68 380 euros au titre des travaux de reprise,
. 6 830 euros au titre des honoraires de maîtrise d'œuvre,
. 3 360 euros au titre des honoraires de BET,
. 2 257 euros au titre de la souscription d'une assurance dommages-ouvrage,
. 6 027 euros en remboursement des frais pendant l'expertise,
. 21 000 euros au titre du préjudice de jouissance,
. 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société AXA France IARD en qualité d'assureur de la société TRADI BAT 94 à garantir Mme G... N... et M. F... L... de toute les condamnations prononcées à leur encontre, en principal, intérêts, frais irrépétibles et dépens,
- condamné in solidum Mme G... N..., M. F... L... et la société AXA France IARD aux dépens incluant les frais d'expertise,
- accordé à Me Marion Hochart, avocat, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
- rejeté les autres demandes.

La société AXA France IARD a exécuté le jugement et versé aux appelantes les sommes suivantes :
- 112.854 € en principal,
- 4.058,74 € au titre des intérêts,
- 31.992,52 € au titre des frais d'expertise.

Mme E... W... et Mme D... V... ont interjeté appel du jugement le 12 mars 2018.

Par leurs dernières conclusions, elles demandent à la cour, de :
. les recevoir en leurs écritures et y faisant droit,
. rejeter les demandes, fins et conclusions des intimés,
. déclarer mal fondés les appels incidents d'AXA et des consorts LN...,
. confirmer le jugement en ce qu'il a jugé que la responsabilité d'AXA et des consorts LN... est engagée,
. réformer partiellement le jugement entrepris,
En conséquence,
A titre principal,
Sur la garantie décennale,
. condamner in solidum les consorts Detret- N... et AXA FRANCE IARD à leur payer les sommes suivantes :
- 144.916,92 € TTC au titre des travaux réparatoires
- 42 048,25 € TTC frais associés aux travaux
- 418 153,44 € TTC en réparation des préjudices
Soit un total de 570.118,71 €.
A titre subsidiaire,
Sur la garantie des vices cachés,
. condamner les consorts LN... à les indemniser de l'ensemble de leurs préjudices pour le montant de 570.118,71 euros,
. condamner in solidum tout succombant à leur verser la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
. condamner in solidum tout succombant aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Marion HOCHART, avocat aux offres de droit, dans les termes de l'article 699 du code de procédure civile.

Par leurs dernières conclusions, M. L... et Mme N... demandent à la cour de :
. dire l'appel recevable mais mal fondé,
. les déclarer recevables et fondées en leur appel incident,
. dire que les acquéreurs ont acheté le bien vendu en l'état et renoncent à toute réclamation à l'égard du vendeur, que l'acte de vente prévoit une possibilité de recours si les travaux d'extension sont affectés de désordres de nature décennale, que la plupart des réclamations portent sur des désordres dépourvus de caractère techniquement décennal et pour la réparation desquels elles sont dépourvues de recours à leur encontre, qu'ils sont profanes en matière de bâtiment, qu'ils n'ont commis aucune faute ou manquement à l'origine des désordres dont il est sollicité réparation, qu'ils sont de bonne foi et n'ont jamais rien dissimulé à leurs acquéreurs qui ont pu visiter le bien à plusieurs reprises,
En conséquence,
. débouter Mme W... et Mme V... de leurs demandes,
. débouter AXA de son appel en garantie,
. sur les quanta ; dire qu'aucune condamnation ne saurait intervenir à leur encontre qui excéderait les conclusions de l'expert quant au montant des travaux, que les appelants n'établissent ni le principe ni la réalité des préjudices immatériels qu'elles invoquent,
en conséquence,
. les débouter de leurs demandes et, à tout le moins, les ramener à de plus justes proportions,
- sur les appels en garantie, confirmer le jugement de ce chef et constater qu'ils doivent être garantis par AXA, assureur de TRADI BAT 94 pour les travaux affectés de désordres de nature décennale et condamner AXA à leur verser 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Par ses dernières conclusions, la société AXA FRANCE IARD demande à la cour de :
- infirmer le jugement et de nouveau :
. juger que le phénomène d'humidité qui affecte le sous-sol réalisé en extension, ne constitue pas un désordre de nature décennale, et juger au surplus que sa cause provient de l'absence d'ouvrages d'étanchéité non garantis par la société AXA FRANCE IARD,
. juger que le défaut de ventilation de la chaudière, et le défaut d'isolation acoustique de certains ouvrants n'ont pas été démontrés techniquement,
. juger que partant les préjudices de jouissance, ainsi que les frais induits par les travaux de reprise relatifs sont injustifiés en leurs principes et montants,
. juger que partant les garanties décennales, et autres garanties facultatives offertes par la société AXA FRANCE IARD ne sauraient être mobilisées,
Subséquemment,
. débouter Mmes W... et V... de leurs réclamations indemnitaires et réparatrices formées à son encontre sur ces chefs encore en cause d'appel, et débouter les consorts LN... de leurs appels en garantie sur ces mêmes chefs,
. condamner Mmes W... et V... à lui restituer au titre de l'indu la somme de 116.912,74 euros TTC et la somme de 31.992,52 euros telles que correspondant à l'exécution du jugement querellé effectuée à ce jour dans la limite des chefs de condamnation au principal assortis du bénéfice de l'exécution provisoire,
Pour le surplus, confirmer le jugement querellé et de nouveau :
- juger qu'aucun des désordres non retenus par les premiers juges ne présente un caractère décennal et/ou n'est imputable aux ouvrages de la société TRADI BAT 94,
- juger que les préjudices de jouissance et fonciers revendiqués par les consorts VW..., au-delà de ceux retenus et appréciés par les premiers juges sont injustifiés en leurs principes et montants,
- juger que partant les garantie décennale et autres garanties facultatives offertes par la société AXA FRANCE IARD ne sauraient être mobilisées,
- débouter les consorts VW... de leurs réclamations indemnitaires et réparatrices formées à son encontre sur ces chefs encore en cause d'appel, et débouter les consorts LN... de leurs appels en garantie sur ces mêmes chefs,
à titre subsidiaire,
- infirmer le jugement querellé et de nouveau :
- juger que les seuls travaux, frais induits et préjudices consécutifs justifiés portent sur une somme totale de 42.270,00 euros TTC,
- débouter les consorts VW... de toutes leurs demandes indemnitaires et réparatrices dépassant cette dernière somme, car infondées en leurs principes et montants et débouter les consorts LN... de leurs appels en garantie sur ces chefs,
- ordonner toute compensation à son profit entre ce principe et le montant de condamnation et le montant de l'exécution provisoire d'ores et déjà versé par ses soins et à hauteur d'une
somme de 116.912,74 euros TTC et condamner les consorts VW... à toute restitution de l'indu pour le surplus,
à titre infiniment subsidiaire,
- confirmer le jugement querellé et de nouveau juger que c'est à bon droit et juste évaluation que les premiers juges ont prononcé au principal un principe et montant de condamnation global de 107.854,00 euros,
- débouter les consorts VW... de toutes leurs demandes indemnitaires et réparatrices dépassant cette dernière somme, car infondées en leurs principes et montants et débouter les consorts LN... de leurs appels en garantie sur ces chefs,
- ordonner toute compensation à son profit entre ce principe et le montant de condamnation et le montant de l'exécution provisoire d'ores et déjà versé par ses soins et à hauteur d'une
somme de 116.912,74 euros TTC et condamner les consorts VW... à toute restitution de l'indu pour le surplus,
à titre plus que subsidiaire,
- juger que c'est à bon droit que l'expert judiciaire a retenu un montant total de travaux de reprise et préjudices consécutifs de 134 487 euros,
- débouter les consorts VW... de toutes leurs demandes indemnitaires et réparatrices dépassant cette dernière somme, car infondées en leurs principes et montants et débouter les consorts LN... de leurs appels en garantie sur ces chefs,
- ordonner toute compensation à son profit entre ce principe et le montant de condamnation et le montant de l'exécution provisoire d'ores et déjà versé par ses soins et à hauteur d'une
somme de 116.912,74 euros TTC et condamner les consorts VW... à toute restitution de l'indu pour le surplus,
sur les limites de garanties et sur l'appel en garantie,
- la juger bien fondée à s'opposer à opposer à tous tiers ses limites et franchises contractuelles notamment au titre des préjudices immatériels consécutifs d'un montant de 3016 euros,
- condamner les consorts LN... à la garantir à hauteur de 15% des principes et condamnations prononcées par l'arrêt à intervenir et l'infirmer en cela,
à titre accessoire,
- condamner tout succombant à lui payer 3 000 euros au titre des frais irrépétibles et aux dépens que la SCP Grapotte-Benetreau pourra recouvrer directement en application de l'article 699 du code de procédure civile.

La clôture de l'instruction a été ordonnée le 10 octobre 2019.

SUR CE

-sur les désordres relevant de la garantie décennale :

Le jugement entrepris a repris les constatations effectuées par l'expert et a constaté que relèvent de la garantie décennale les désordres suivants :
. les désordres liés à l'humidité en sous-sol causés par des remontées d'eau par capillarité et infiltrations d'eau depuis les plafonds dans l'extension,
. l'humidité résultant de la non-conformité de la ventilation en sous-sol où se trouve une chaudière à gaz,
. l'absence de conformité des menuiseries posées par la société TRADI BAT 94 aux normes d'isolation acoustique des bâtiments d'habitation.

L'article 1792 du code civil dispose que tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.

Aux termes des dispositions la responsabilité civile décennale d'un locateur d'ouvrage, et subséquemment la garantie décennale de son assureur de responsabilité, ne peuvent être retenues que dès lors qu'il existe un désordre de nature décennale soit en ce qu'il porte atteinte à la destination des lieux ou encore à leur pérennité.

En l'espèce l'expert a constaté, concernant l'humidité en sous-sol, qu'à l'intérieur on visualise deux types d'humidité (les remontées d'eau par capillarité et les infiltrations d'eau par les plafonds) avec coulures, salpêtre, écaillage de peinture, et des plafonds et murs globalement saturés d'eau et qu'à l'extérieur on visualise des pathologies au niveau de la dalle de plancher eau de la «salle de sport» ( fissures traversantes généralisées, absence d'étanchéité en retombée, effritement ponctuel de la dalle, pas de joint étanche entre la dalle et les terrasses voisines). [p. 23 et 24 du rapport].

Ces constatations matérielles ne sont pas contestées par les parties ni le fait que l'origine de l'humidité en sous-sol est ancienne ainsi que le relève l'expert.

La société AXA conteste néanmoins la nature décennale de ces désordres et soutient qu'en l'état des constatations effectuées par l'expert, le sous-sol est seulement affecté d'une humidité normale acceptable pour un local de sa catégorie; elle fait valoir que son assurée a réalisé aux termes de son marché une extension en sous-sol à usage de cave/chaufferie transformée après réception en pièces à usage d'habitation.

L'expert conclut en page 44 de son rapport que les risques pour les personnes et les biens sont réels dans la mesure où les désordres liés à l'humidité peuvent atteindre l'installation électrique du sous-sol.

Compte-tenu de cet élément, peu importe l'usage qui est fait du sous-sol, les désordres d'humidité constatés par l'expert sont tels qu'ils rendent l'ouvrage qu'est l'extension impropre à sa destination ainsi que l'a rappelé le premier juge en soulignant que ce local n'est pas étanche à l'air et à l'eau et est affecté d'infiltrations et de fissures traversantes.

L'expert souligne par ailleurs que l'entreprise TRADI BAT 94 n'a pas intégré d'étanchéité de la dalle de béton créée, ni prévu de coupure de capillarité au droit des maçonneries enterrées et qu'elle n'a pas informé ses donneurs d'ordre des risques de venues d'eau depuis le terrain naturel et les cours anglaises (p.43 du rapport).

En conséquence, eu égard à l'importance des désordres liés à l'humidité et au risque électrique que cela représente, il ne peut être soutenu par AXA que la société TRADI BAT 94, dont elle est l'assureur pour les travaux réalisés, ne peut être tenue pour responsable, au titre de la garantie décennale, des désordres au seul motif que l'étanchéité ne figurait pas dans les travaux d'extension qui lui ont été confiés.

L'expert a en outre constaté que le mauvais positionnement de la ventilation basse de la chaudière constitue un risque pour les personnes en cas de fuite de gaz et est donc un désordre relevant de la garantie décennale auquel il peut néanmoins être remédié par des travaux mineurs.

La société AXA conteste la non-conformité de la ventilation sans démontrer que le positionnement actuel de la ventilation est sans risque pour les personnes.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

La société AXA conteste les conclusions du rapport de l'expert et le jugement en ce qu'il a retenu que les menuiseries ne sont pas conformes aux normes d'isolation acoustique et que cela constitue un désordre rendant l'ouvrage impropre à sa destination.

Il résulte du rapport de l'expert que celui-ci s'est fondé, pour dire que les menuiseries ne sont pas conformes aux normes, à des mesures établies dans le cadre d'un rapport établi par un acousticien à la demande de Mmes W... et V... et que l'expert, M. K..., conclut que la cause du désordre est le non-respect par l'entreprise TRADI BAT 94 des arrêtés des 30 mai 1996 et 30 juin 1999 relatifs aux caractéristiques acoustiques des bâtiments d'habitation ; si l'expert précise qu'aucun risque n'est à craindre, il constate néanmoins que la gêne acoustique est réelle bien que réduite (p. 51 du rapport).

La société AXA, dans son dire no1 à l'expert qu'elle produit, n'a pas contesté la validité des mesures acoustiques effectuées par General Acoustics.

Le devis de la société TRADI BAT 94 du 28 avril 2004 comporte la fourniture et pose de menuiseries, en conséquence la société AXA ne peut valablement soutenir que ce n'est pas la société qui a décidé des menuiseries à poser.

Dès lors que l'absence de conformité des menuiseries aux normes fixées par les arrêtés mentionnés par l'expert n'est pas contestée, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a dit que les menuiseries posées par la société TRADI BAT 94 constituent un ouvrage impropre à sa destination.

Mmes W... et V... contestent le jugement en ce qu'il a estimé que les désordres constatés au niveau de la dalle correspondant au plancher haut de l'extension ne sont pas de nature décennale.

Le premier juge a estimé que la dalle, bien qu'affectée d'un défaut de conception et d'exécution, ne présente pas de désordre apparu dans le délai de la garantie décennale.

Dès lors que l'expert précise, en conclusion de son rapport, qu'aucun désordre structurel majeur n'est constaté au niveau de la dalle porteuse, le fait que la capacité portante de la dalle ne permette pas, selon l'expert, de rajouter des charges complémentaires (passage et/ou stationnement de véhicules) sans renforcement de la structure ne suffit pas à établir l'existence d'un désordre relevant de la garantie décennale étant constaté, comme l'a relevé le premier juge, que la date d'apparition des fissurations au droit de la dalle n'est pas datée, l'ordonnance du 24 mars 2015 qui a étendu la mission de l'expert à l'examen des défauts affectant la dalle porteuse ne précisant pas si, à cette date, des désordres étaient apparus.

Le jugement sera donc confirmé de ce chef.

Sur le montant des travaux réparatoires au titre des désordres relevant de la garantie décennale

Les appelantes et la société AXA sollicitent l'infirmation du jugement en ce qu'il a fixé à 68 380 euros TTC les sommes allouées au titre des travaux de reprise soit 60 450 euros TTC pour la démolition et la reconstruction de l'extension et 7 930 euros TTC pour la non-conformité des menuiseries aux normes acoustiques.

L'humidité nécessite la démolition et la reconstruction de l'extension selon l'expert, travaux qu'il chiffre à 60 450 euros TTC.

La société AXA qui demande d'évaluer ce montant à 30 270 euros TTC ne s'explique pas sur ce montant ni ne précise les devis auxquels elle se réfère, la seule référence aux pages 56 et 57 du rapport d'expertise ne permettant pas de connaître à quels travaux correspond le montant d'indemnisation qu'elle propose.

Il est constant, à la lecture du rapport d'expertise, que l'expert a chiffré le coût des travaux de reprise au coût de démolition et de reconstruction de l'extension du sous-sol compte-tenu de l'importance des désordres d'humidité l'affectant, coût évalué à 60 400 euros TTC, et qu'il ne précise pas le détail de ces travaux; en conséquence, la présente juridiction ne dispose d'aucun élément lui permettant d'en réduire le montant dès lors que l'expert a chiffré les travaux de réparation de manière globale.

Les autres devis visés en page 56 du rapport correspondent à des devis d'étanchéité qui ne seront pas retenus dès lors que les travaux effectués par la société TRADI BAT 94 n'incluaient pas l'étanchéité.

Mmes W... et V..., qui demandent d'évaluer les travaux de réparation à 144 916,92 euros TTC, ne s'expliquent pas plus sur ce montant et se contentent de produire un tableau récapitulatif des devis établis à la demande de l'expert, pour un montant total TTC de 122 126,92 euros TTC incluant les honoraires du bureau d'études, l'actualisation des contrats de travaux et le suivi de chantier; elles ne précisent pas à quel type de désordres correspondent les devis cités qu'elles ne font qu'additionner et ne s'expliquent donc pas sur le montant de 144 916,92 euros sollicités au regard des seuls désordres retenus par la cour.
En conséquence le jugement sera confirmé en ce qu'il a fixé à 60 450 euros TTC le devis pour remédier aux désordres d'humidité de l'extension relevant de la garantie décennale et à la somme de 7 930 euros TTC les travaux de mise en conformité des menuiseries.

Il convient de préciser que ces travaux de reprise ont pour conséquence, ainsi que le précise l'expert en page 56 de son rapport, de reprendre de nombreux points du présent litige à savoir, outre les désordres précédemment retenus au titre de la garantie décennale, les problèmes de portance de la dalle, l'ancienne porte d'entrée, la ventilation bain, les fissures sur l'escalier béton et l'humidité en cuisine, désordres qu'il n'y a donc pas lieu d'examiner.
Les appelantes qui sollicitent, au titre de la souscription d'une assurance dommage ouvrage, une somme égale à 5% du travaux, ne justifient pas du bien fondé du pourcentage qu'elles retiennent.

Mmes W... et V... demandent une somme de 12 210 euros TTC au titre des honoraires du BET mais produisent à ce titre une facture de travaux de 109 916, 92 euros, qui n'est pas le montant de travaux retenus en l'espèce ; ce montant n'est donc pas fondé.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné in solidum les consorts LN... et la société AXA au paiement des honoraires de maîtrise d'œuvre, justement évalués à 10% du montant des travaux par le premier juge, soit 6 830 euros TTC, des honoraires du BET de 3 360 euros TTC et la souscription d'une assurance dommages-ouvrage à hauteur de 3% du montant des travaux soit 2 257 euros TTC.

-Sur les autres désordres :

Le premier juge a rejeté, pour les motifs précisés ci-après, les demandes de Mmes W... et V... portant sur les désordres suivants :

. le coût de réfection de la toiture pour remédier à l'humidité en cuisine et les fissures en façade en l'absence d'imputabilité des désordres aux travaux réalisés par la société TRADI BAT 94 notamment du fait de l'existence de plusieurs causes possibles et, pour les fissures en façade, de l'absence de nature décennale,

. le garde-corps au motif qu'il existait avant les travaux,

. la lustrerie dans les douches qui n'est pas chiffré,

. les fissures de l'escalier béton qui sont mineures et pas de nature décennale,

. l'absence de ventilation dans les salles de bains, visible par les acquéreurs et non de nature décennale,

. les désordres dans les chambres d'amis qui ne sont pas des vices cachés de nature décennale puisqu'ils ne rendent pas l'ouvrage impropre à sa destination,

. l'étanchéité des douches qui n'est affectée d'aucun désordre selon l'expert.

Mmes W... et V... ne produisent aucun élément utile au soutien de leur appel sur ces désordres.

Elles reconnaissent, pour les fissures en façade, que la cause n'est pas déterminée par l'expert.

Il est établi que l'humidité en cuisine, la ventilation bains et les fissures sur l'escalier béton seront réparées par les travaux de reconstruction de l'extension, ce qui rend les demandes sans objet.

Sur le garde corps ( «allège baie» dans le rapport d'expert ) il convient de constater que ce désordre, à savoir la non-conformité de l'allège baie qui n'est, aux termes du rapport de l'expert, reconnaissable que par les hommes de l'art, ne peut être imputée aux travaux réalisés par la société TRADI BAT 94 dès lors que cela ne figure pas sur la facture de travaux du 28 avril 2004, corroborant le fait que ce défaut de conformité existait avant les travaux.

Sur la lustrerie, si l'expert a constaté que la lustrerie dans les douches est à neutraliser en raison d'un risque pour les personnes et les biens, il convient de constater, à l'instar du premier juge, que l'expert n'a pas chiffré ces travaux et que les appelantes n'ont pas conclu sur cette absence de chiffrage.

S'agissant des désordres constatés dans la chambre d'amis, les conclusions de l'expert ne permettent pas de retenir que le défaut d'exécution constaté par l'expert rende l'ouvrage impropre à sa destination et, en conséquence, ils n'entrent pas dans la garantie décennale.

Quant à l'étanchéité des douches, l'expert n'a constaté, en page 48 de son rapport, aucune fuite au droit des douches des étages.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes relatives à ces désordres.

-Sur les autres préjudices :

*Le préjudice de jouissance

Le premier juge a alloué une somme de 21 000 euros qui est conforme à l'évaluation du préjudice par l'expert.

Les appelantes sollicitent à ce titre une somme totale de 149 145,92 euros à ce titre.

L'expert ne retient à ce titre que la perte de jouissance de la salle de sports pour 11 880, 00 euros, un préjudice de jouissance de la dalle parking et une perte d'occupation pendant la durée des travaux de 9 000 euros.

Dès lors que la responsabilité décennale a été écartée pour la dalle, le premier juge sera confirmé en ce qu'il a écarté ce préjudice de jouissance.

Les appelantes font valoir une perte de luminosité de l'atelier au motif que l'atelier jouit, avant travaux d'une surface vitrée de 7 397 cm², alors qu'après travaux la surface vitrée de l'atelier sera de 3 225 cm² soit une perte de près de la moitié de la surface vitrée.

Dès lors que l'expert constate que la suppression des pavés de verre sera compensée par la création de la baie vitrée en termes de luminosité de l'atelier et ne retient pas ce préjudice, il n'est pas établi.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a retenu les seuls préjudices de jouissance retenus par l'expert à l'exception du préjudice de jouissance de dalle parking qui, bien qu'établi, ne résulte pas de désordres retenus au titre de la garantie décennale. .

*Le préjudice psychologique ou moral

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté ce préjudice au motif qu'il n'est pas établi par les pièces produites par Mmes W... et V..., le fait pour les appelantes de souligner les risques inhérents aux désordres constatés tels que précisés dans le rapport d'expert ne permettant pas d'établir la réalité de ce préjudice ni de le quantifier.

*La perte de valeur vénale

Celle-ci n'est pas établie dès lors que les travaux de reprise consistent en la reconstruction des parties d'habitation affectées de désordres et que la perte de luminosité dans l'atelier n'est pas établie.

La demande à ce titre sera rejetée et le jugement confirmé de ce chef.

-Sur les condamnations in solidum et la garantie de la société AXA :

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné in solidum les consorts LN... et la société AXA au paiement des sommes allouées à Mmes W... et V... en réparation de leurs préjudices.

Néanmoins, dès lors que les désordres et les préjudices qui en résultent sont imputables à des fautes d'exécution de la société TRADI BAT 94, assurée pour ces travaux par la société AXA FRANCE IARD, cette dernière doit être condamnée à garantir les consorts LN... de ces condamnations, l'immixtion fautive de ces derniers dans le cadre du chantier litigieux n'étant pas établie et la proposition de l'expert de mettre à la charge de ces derniers 15% de responsabilité n'étant pas étayée.

La société AXA fait valoir une franchise contractuelle de 3 060 euros.

Il résulte néanmoins de la police produite que cette franchise ne s'applique pas à l'article 8 de cette police à savoir la responsabilité décennale pour travaux de bâtiment, cette demande d'AXA sera donc rejetée.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a condamné AXA à garantir les consorts LN... de toutes condamnations prononcées à leur encontre en principal, intérêts, frais irrépétibles et dépens.

-Sur les demandes accessoires :

L'équité commande de condamner in solidum M. L..., Mme N... et la société AXA FRANCE IARD à payer à Mmes W... et V... la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens incluant les frais d'expertise.

Il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de M. L..., Mme N... de condamner la société AXA FRANCE IARD à leur payer une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement,

Confirme le jugement du tribunal de grande instance de Créteil du 20 janvier 2018 en toutes ses dispositions,

Condamne in solidum M. L..., Mme N... et la société AXA FRANCE IARD à payer à Mmes W... et V... la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette le surplus des demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum M. L..., Mme N... et la société AXA FRANCE IARD aux dépens incluant les frais d'expertise, dépens qui pourront être recouvrés directement par la SCP Grapotte-Benetreau pour ceux dont elle a fait l'avance.

Source : DILA - dernière mise à jour 12 juillet 2021 - https://echanges.dila.gouv.fr/OPENDATA/

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