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Les critères d'imputabilité médicolégale permettant à l'expert d'établir un lien entre l'IMOC et une faute commise par un gynécologue-obstétricien ou une sage-femme comportent des difficultés nouvelles qui surviennent lors des expertises médicales. L'avocat spécialiste et son médecin conseil doivent les comprendre car s'agissant d'un point critique dont la reconnaissance est nécessaire au succès de l'action de la victime d'infirmité motrice cérébrale : en effet, sans imputabilité médicolégale, il est peu probable que le juge retienne un lien de causalité juridique entre la faute et le préjudice.


La première difficulté concerne l'utilisation du pH eucapnique par certains médecins conseils d'assurance alors que le déficit de base est le moyen accepté par le corps médical pour apprécier l'acidose métabolique (le type d'acidose vraiment dangereux pour le fœtus). Le pH eucapnique permet de corriger le pH de sa composante respiratoire (qui n'est pas dangereuse pour le fœtus) afin de dégager un pH qui représente la seule composante métabolique. Ces médecins conseils soulèvent que le pH eucapnique serait plus fiable que le déficit de base pour l'estimation de l'acidose métabolique. En réalité des expressions mathématiques permettent d'obtenir l'un et l'autre à partir du pH et le niveau de gaz carbonique et il est ainsi inexact de prétendre que l'un serait supérieur à l'autre. Vous pouvez voir leur calcul avec notre simulateur d'appareil d'analyse des gaz du sang et aller plus loin avec notre étude de validation.


La deuxième difficulté concerne le score d'Apgar relevé pendant la réanimation. Or, ce score est souvent artificiellement élevé en raison de la ventilation artificielle qui ne reflète pas l'état réel de l'enfant. Autrement dit, pour un même profondeur d'anoxie chez un même nouveau-né, les scores d'Apgar avec et sans ventilation artificielle seraient différents. Il convient donc d'ajuster le score d'Apgar pour cette ventilation qui n'est pas spontanée afin de ne pas écarter à tort l'imputabilité médicolégale de l'infirmité motrice cérébrale et à cet égard l'avocat (avec son médecin conseil) doit rester vigilent.


La troisième difficulté concerne la chronologie de l'apparition des convulsions afin de déduire le moment supposé de la survenance (avant ou pendant l'accouchement) de l'atteinte fœtale par anoxie. Habituellement, dans le cas d'un manque d'oxygène avec souffrance fœtale pendant l'accouchement, les convulsions commencent à partir de la 6e heure de vie mais avant la 24e heure de vie.

En effet, lors d'une atteinte par anoxie pendant l'accouchement, l'activité électrique du cerveau est fortement déprimée dans un premier temps en raison d'une diminution de la perfusion du sang du cerveau après l'atteinte et l'activité électrique ne commence à augmenter en intensité (avec activité de type épileptique) que 6 heures plus tard en raison de l'augmentation de la perfusion du cerveau. C'est cette reperfusion qui amène les convulsions, l'œdème et la libération de molécules excito-toxiques à l'origine d'une défaillance cellulaire secondaire.

Ceci explique pourquoi l'hypothermie thérapeutique chez l'enfant atteint d'encéphalopathie anoxo-ischémique survenue pendant l'accouchement doit être commencée avant 6 heures de vie et donc en théorie avant l'apparition des convulsions.

En revanche, l'apparition des convulsions avant 6 heures de vie pourrait traduire une souffrance fœtale chronique ou autre atteinte avant l'accouchement donc pendant la grossesse.

Le cas échéant l'avocat (avec son médecin conseil) doit reconnaître que ces données résultent de l'expérimentation animale, que cliniquement les convulsions chez le nouveau-né font souvent l'objet d'erreurs de diagnostic et que certains auteurs n'ont pas trouvé de corrélation entre la chronologie des convulsions et le moment de l'atteinte du cerveau du fœtus (Ahn, Korst et Phelan, 1998).